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  • : Ce site / blog artistique et ludique a pour vocation de présenter mes productions, et celles d'auteurs invités : livres, poèmes, chansons, nouvelles, expositions, billets d'humeur sur la vie culturelle, politique, sociale et juridique, émissions de radion, compositions musicales électro-acoustiques.
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24 novembre 2008 1 24 /11 /novembre /2008 16:56

L'aumône d'une invitation




Ma Bourgogne  natale est empreinte de l'histoire des communautés  monacales.

Enfant, je suivais inlassablement le parcours  des moines de l'abbaye de Cluny. Visitant fréquemment le réfectoire, le cloître,  les cellules des moines,  qui les abritaient bien avant l'An Mil...   

La vie à l'abbaye, ne m'enthousiasme en fait pas totalement. La  prière et le jeûne, non merci, très peu pour moi !

Comment faisaient-ils ? Se lever avant le soleil, travailler, chanter, supporter les autres avec bonhomie, et quasiment rien dans le ventre...De saints hommes assurément ! Seule une passion chevillée au corps pouvait les rendre heureux. L'amour de Dieu, sans doute.
 
 - Tu vois, Flore, à l'époque, je n'y songeais pas. Mais maintenant, une évidence  m'insupporte ! Même que carrément, ça m'irrite. ! Tous ces hommes, qu'on a  occupés à servir Dieu à genoux, à jardiner accroupis, et à dormir debout de Matines  à Complies. Tu te rends compte ? A quoi ont-ils servi ?  Si on en avait fait des tangueros ? On ne serait peut-être pas là, à s'enquiquiner sur nos bancs , en attendant l'aumône d'une invitation ! Le Bon Dieu n'y aurait vu que du feu. P'têtre même qu'il aurait trouvé ça génial, cette harmonie entre hommes et femmes.

 - Juste pour le fun, pour la danse, sans arrière pensée ?

-Oui, juste clean, comme on voudrait ! Bien sûr, il y a la question de la descendance, de la formation. Ou  du compagnonnage...Il aurait fallu que nos aïeules entretiennent le « parc » ! Parce que, question génération spontanée, les moinillons, bernique ! Copains-copains, ça oui, paraît-il ! Mais prêts à prendre des responsabilités de famille, je doute !

 - Mais Bulle qu'est-ce que tu racontes ? Tu sais , qu'avec des plans  pareils, tu te serais fait épingler  par l'Inquisition, bien  avant que la Cumparsita flotte sur Rio de la Plata ?! Parle moi plutôt de ton abbaye, je ne connais pas celle ci.

Et je lui décris, ce qui me semble se dessiner au premier regard. D'abord un immense décor de pierre blanche. Somptueux mais simple, sans ostentation. Solide, élégant.  Roman, avec un peu de gothique sur la fin. La construction fut longue. Et sur trois niveaux se recouvrant, deux clochers subsistent d'entre les sept. Le son ample et rond de la cloche à chaque quart d'heure. Plusieurs tours et clochers. Le  farinier des moines, tel une nef, avec sa charpente de châtaignier en coquze de bateau inversée . Il est  devenu musée lapidaire.

Des noms prestigieux me faisaient rêver : Le pape Gélase. Un pape en pleine Bourgogne, qui l'eût cru ? Délocalisé pour échapper aux taxes de la mafia sur le vin de messe. A ce qu'on dit. 

Abélard, le philosophe amoureux qui se retira ici,  Héloïse... Je n'accédais pas aux détails contrariants de leur mésaventure, qui frappaient les adultes. Les hommes surtout... qui ont la compassion génitale aisée... quand il s' agit de virilité en péril. Ah s'ils avaient connu le tango : plus de problème de rencontres interdites. Mais je rêvais de ce petit monde affairé, se recentrant pour les temps de prière, et de chants en chœur sous la nef immense.

Et le silence recueilli du repas . Du pain, un peu de vin du cru, des légumes du potager. .  Au moins, c'était bio. La prière aidant à  faire oublier la frugalité. Du jardin médiéval, les simples  sagement cultivées en carrés, nourrissaient et soignaient. Le jardin , quel merveilleux espace de vie créé par l'homme. Ordonné avec rigueur par un soin constant., dans un souci de productivité comme d'esthétique. Les banquettes herbeuses, les pavements de céramique bleutée, les plessis tressés, les topiaires,  les cloches de verre pour les salades.

Hélas, les traces de cultures vivrières ont disparu. Subsistent des  allées et des pelouses étendues et calmes.. La puissante senteur du buis des bordures, suffit à faire remonter la pensée au Moyen Age.  Beaucoup d'arbres odorants, comme le  tilleul séculaire.

 -  A t 'entendre, Bulle, on dirait  Alice au pays des merveilles !

 - En fin de compte, tu vois Flore, au «  Conventillo » ce  n'est pas si différent. C'est un peu le principe de la basilique médiévale.

Après un temps d'initiation, On entre, on sort librement, en groupe ou pas. On se réfugie, on partage, on refait le monde. Avec Dieu pour témoin incrédule. Ici, le carré, c'est autre chose. Mais il est toujours tracé au sol par l'homme. C'est une base universelle  aussi. Le silence, la ferveur,  la rigueur, indispensables pour bien danser. Les  banquettes  d'ici ont perdu leur herbe. Dommage pour  nous les femmes, qui les connaissons trop bien, à force d'attendre.

 - Heureusement, on a la prière intérieure pour espérer danser, et le vin argentin pour se griser. Parfait pour pouvoir prendre un rôle, dans  ce genre  de mystère, n'est-ce pas Bulle? Pour s'y sentir admis, accueilli... 


En l'An Mil , Les Playmobil comme les poupées-mannequins  n'existaient pas. Au début des  années soixante, très peu.

Mais il y avait  beaucoup mieux, pour  rêver, sans avoir à  manipuler des jouets. Regarder, et imaginer. Dans toutes les vitrines du village, tous les foyers, figuraient des objets de faïence, ustensiles du quotidien, représentant des moines en bure brune, ceints d'une cordelière. Gras, chauves , dodus et goguenards. Pichets , coquetiers, salières et poivrières  témoignaient sous une joyeuse apparence humaine,  d'une vie heureuse dans la maison du Bon Dieu. Insouciance de l'après-guerre ? Débordement de l'abondance après la malnutrition? Piété sincèrement  épanouie ?

Leurs glorieuses petites bedaines me parlaient en direct, à moi , la Boule gourmande. Ces figurines me touchaient et me réjouissaient. J'aurais tellement aimé en avoir une. Juste un pot à eau.  Juste un bon gros Bénédictin à la trogne réjouie !! Mais à la maison, le kitsch proclérical du début des sixties n'était pas en odeur de sainteté...Donc adieu chers moines domestiques ! Un jour, quand je serai grande, j'en aurai un rien qu'à moi ! Na !

Dire qu'un jour vous serez supplantés, dans votre mission de paternelle et virile présence auprès de la ménagère, par Monsieur Propre. Un sex-symbol mâle dans la cuisine ! Libération des mœurs ?  La calvitie n'est plus seulement rassurante. Elle devient un puissant  atout de séduction.  Sans doute pas un hasard. Paraît qu'il y a un lien direct entre ce minimalisme capillaire et le taux d'hormones mâles.

De nos jours, l'apparence physique compte ! Et pour accéder au tango, qu'on soit homme ou femme, il vaut mieux  plaire. Etre bien sûr « conforme », mais  avoir une identité forte, reconnaissable.  Si possible, avoir un style, et pas n'importe lequel .


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