La justice française, par Pierre Alain Gourion
photo A Gourion
La justice française est assez moderne mais honteusement pauvre.
Nous avons dix juges pour cent mille habitants, contre vingt cinq en Allemagne. Rapporté au produit intérieur brut (PIB), l'effort budgétaire qui est consacré au système judiciaire public place la France au vingt neuvième rang sur le continent européen.
Le pays lui consacre cinquante et un euros par an et par personne, la moitié de ce que nos voisins allemands dépensent. Si son aide judiciaire (assistance que l'Etat fournit aux personnes qui n'ont pas les moyens financiers suffisants pour se défendre elles-mêmes devant un tribunal) est assez bien doté, la rémunéraration des avocats à ce titre est notoirement faible et fait supporter aux moins riches d'entre eux une véritable charge de service public.
Les magistrats non professionnels y sont beaucoup moins nombreux qu'en Grande Bretagne où la grande majorité des litiges est réglée par les "magistrates", citoyens bénévoles.
La Convention européenne des droits de l'homme proclame que "toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable : les procédures de licenciement devant les Conseils de Prud'homme et de divorce devant les Tribunaux de Grande Instance sont chez nous parmi les plus longues d'Europe.
Outre le budget de l'Etat qui devrait au moins être doublé à moyen terme, une culture de l'évaluation pourrait avantageusement être développée : questionnaires aux usagers à la suite des audiences, enquètes de satisfaction, renforcement des procédures disciplinaires contre les magistrats (faute déontologique ou insuffisance professionnelle), avec garantie de leur indépendance, comme aux Pays-Bas, en Belgique ou en Espagne.
photo Gilles Verneret
Sources : Le Monde du 6 octobre 2006, enquête de la Commission européenne pour l'efficacité de la justice et interview de Jean-Paul JEAN, Magistrat, Président du groupe des experts de la CEPEJ.